Qu’est-ce que la maladie à Corps de Lewy ?


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S’il est vrai que la maladie à Corps de Lewy (MCL) présente certaines similitudes de symptômes avec les maladies de Parkinson et d’Alzheimer, elle répond à des critères qui lui sont propres et nécessite une prise en charge bien particulière des patients. Durant de nombreuses années, un amalgame erroné dans le diagnostic et la prise en charge a empêché la maladie à Corps de Lewy d’être reconnue et traitée en tant que telle. 

M. Philippe de Linares, co-fondateur et président de l’Association des Aidants et Malades à Corps de Lewy (a2mcl.org)  multiplie les actions en faveur des malades, des aidants et d’une meilleure information. Aidé du comité scientifique de l’association, composé notamment des éminents professeurs et spécialistes de la maladie à Corps de Lewy, Frédéric Blanc et Claire Paquet, il livre un combat de tous les jours pour faire sortir de l’ombre cette maladie méconnue et pourtant loin d’être rare.  

Quelles sont les caractéristiques de la maladie à Corps de Lewy ?

La maladie à Corps de Lewy (MCL), encore parfois appelée “démence à corps de Lewy (DCL)”, est la seconde démence neurocognitive la plus fréquente après la maladie d’Alzheimer. 

Elle est caractérisée par des dépôts anormaux d’une protéine appelée alpha-synucléine, à l’intérieur des cellules du cerveau. Les Corps de Lewy ont été  nommés ainsi au nom du Dr. Friederich Heinrich Lewy qui a été le premier à décrire ces structures découvertes dans le cerveau de patients atteints de la maladie de Parkinson au moment du décès.

Il s’agit d’inclusions neuronales constituées d’agrégats de filaments causés par une accumulation anormale de la protéine alpha-synucléine. Ces dépôts interrompent les messages transmis par le cerveau, altérant les fonctions cognitives occasionnant une perte progressive des facultés intellectuelles et généralement une dépendance sévère. 

Ce phénomène caractérise également la maladie de Parkinson. Cependant, chez les “Parkinsoniens”, les Corps de Lewy restent localisés dans les cellules du tronc cérébral, responsables du contrôle du mouvement. En cas de MCL, les Corps de Lewy sont également présents dans la couche externe du cerveau, le cortex, qui est responsable des fonctions mentales. Ces Corps de Lewy corticaux  constituent l’élément pathologique majeur de la maladie à Corps de Lewy. 

“Le terme de maladie apparentée à Alzheimer ou forme de Parkinson est obsolète et doit être remplacé par l’appellation correcte, dès lors que l’on a identifié la maladie,” précise M. de Linares. 

Lui-même aidant d’une compagne atteinte de MCL durant de nombreuses années, le président de l’Association a souvent dû lutter au quotidien contre cet amalgame erroné. Durant cet épisode douloureux en effet, il a refusé de se résoudre aux diagnostics des médecins mettant en cause une maladie de Parkinson, avec la ferme conviction que les symptômes qu’il avait dû apprendre à gérer de fait appartenaient à un trouble bien distinct. 

A l’heure actuelle, hormis certains facteurs de risque mis en évidence de manière commune à plusieurs maladies neuro-dégénératives, il n’existe pas de cause connue au déclenchement des phénomènes caractéristiques de la maladie à Corps de Lewy. 

Quels sont les symptômes de la maladie à Corps de Lewy ?

Il faut d’abord que le malade ait des troubles cognitifs : troubles de l’attention, de l’orientation, des difficultés à verbaliser, à réaliser certaines tâches simples. D’un malade à l’autre, les autres symptômes peuvent être très différents, ce qui rend le diagnostic d’autant plus difficile. Il existe toutefois 4 catégories principales de symptômes que l’on nomme les symptômes cardinaux de la maladie à Corps de Lewy.

  1. Une grande fluctuation dans les troubles cognitifs est un indicateur très révélateur de la maladie à Corps de Lewy.
  2. Des symptômes moteurs “parkinsoniens”. 
  3. Des hallucinations, généralement visuelles. 
  4. Des troubles du comportement durant le sommeil paradoxal. Il s’agit d’une forme de somnambulisme particulier, très fréquent en cas de maladie à Corps de Lewy.

Lorsque le malade présente, en plus les troubles cognitifs, deux de ces symptômes, on peut conclure de façon quasi-certaine à une maladie à Corps de Lewy.

Les critères de diagnostic clinique dits de “McKeith”  apportent d’ailleurs des réponses très claires à ce sujet. La difficulté du diagnostic réside surtout dans les fluctuations des symptômes d’un malade à l’autre et souvent même d’une période à l’autre chez le même patient. Il s’agit effectivement d’une maladie qui doit être abordée au cas par cas, avec beaucoup d’attention et d’approfondissement au moment d’établir le diagnostic, afin de permettre au médecin de ne pas conclure trop rapidement à une maladie d’Alzheimer ou de Parkinson, malgré d’autres signes qui devraient attirer son attention. 

A l’heure actuelle, nous sommes donc en mesure de poser un diagnostic précis sur la maladie à Corps de Lewy et il est impératif pour le bien-être des malades et des aidants familiaux de se détacher d’un amalgame obsolète que l’on aurait encore tendance à faire aujourd’hui avec les maladies de Parkinson et d’Alzheimer. 

Existe-t-il des traitements pour la maladie à Corps de Lewy ?

Actuellement, il n’existe pas de traitements qui permettent de guérir cette maladie neurodégénérative. Les traitements de la maladie à Corps de Lewy sont surtout symptomatiques. Ils se limitent donc à gérer les symptômes, en particulier les hallucinations, les syndromes parkinsoniens et le déficit cognitif.

Quel est l’impératif de poser un diagnostic correct sur la maladie à Corps de Lewy ? 

Certains symptômes s’apparentant à la maladie d’Alzheimer et à la maladie de Parkinson rendent son diagnostic plus compliqué. “Il est impératif de faire la différence, explique M. de Linares. Une erreur de diagnostic aura  notamment des conséquences sur le rapport au malade et à sa prise en charge ainsi que sur la prescription de médicaments comme certains neuroleptiques préconisés parfois pour la maladie d’Alzheimer mais extrêmement dangereux pour des malades à Corps de Lewy.” 

Un diagnostic clair permet en outre de guider les recherches scientifiques et médicales concernant la maladie à Corps de Lewy et de multiplier l’information en EHPAD, auprès des médecins et professionnels de la santé, des aidants et du grand public pour une meilleure prise en charge  et un accompagnement adapté de ces personnes. “La recherche reste encore trop faible à ce sujet. Il y a évidemment de nombreuses pistes à explorer : pourquoi, brusquement des Corps de Lewy se diffusent-ils dans le cerveau et provoquent tous ces troubles ?  Pourquoi, contrairement à ce que l’on observe chez les Parkinsoniens où la diffusion reste localisée dans le tronc cérébral, chez les malades à Corps de Lewy ce phénomène s’étend bien plus largement et en particulier dans le cortex ? Et bien d’autres pistes à explorer. Il existe donc une recherche importante à effectuer,” précise le président de l’Association. 

Par ailleurs, il serait important de comprendre pourquoi certains traitements des symptômes de la maladie d’Alzheimer peuvent s’avérer particulièrement efficaces pour la maladie à Corps de Lewy, comme la Rivastigmine et le Donépézil, alors que d’autres peuvent être inefficaces, dangereux, voire mortels, comme les neuroleptiques de première génération. 

Par manque d’information et de campagne de sensibilisation, les médecins urgentistes ou aides-soignants d’établissements au sein desquels la maladie à Corps de Lewy ne serait pas assez connue, pourraient avoir tendance, face à un malade qui présente des troubles du comportement importants, à lui administrer un neuroleptique qui peut avoir sur lui des conséquences dramatiques. “La recherche a véritablement besoin de comprendre cette maladie, les causes et  les  traitements adaptés”, poursuit M. de Linares lors de notre entretien. 

A l’heure actuelle, il existe en France un centre de référence pour des démences rares mais pas pour la maladie à Corps de Lewy qui est loin d’être une maladie rare, ce qui paraît aberrant aux yeux du président de l’Association et des professeurs de son comité.  Même si la recherche est internationale et connaît quelques avancées, en particulier aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, elle reste largement insuffisante, partout mais surtout en France. 

On retrouve tout de même quelques centres de recherche importants, notamment  à Paris avec le professeur Claire Paquet et à Strasbourg, avec le professeur Frédéric Blanc, tous les deux membres du comité scientifique de l’Association des Aidants et Malades à Corps de Lewy. 

Lors d’une interview exclusive pour le “Journal du Parlement”, le professeur Blanc fait part de l’état de ses recherches : “Nos travaux au sein du Laboratoire ICube et du Centre Mémoire Ressources et Recherche à Strasbourg sont multiples. Ils permettent d'offrir une approche transversale, tout à fait inédite sur la MCL, qui se conjugue à travers plusieurs priorités... La première consiste à décrire précisément le stade prodromal, c'est-à-dire avant la démence, au sens médical du terme, cette période qui précède les conséquences dramatiques prenant en otage le patient dans sa vie quotidienne, quand il ne peut plus utiliser le téléphone, trier ses papiers ou conduire. La maladie est alors installée depuis 15 ou 20 ans. Aussi, l'enjeu consiste à la repérer en amont. C'est d'autant plus primordial, que de là, découle la question du traitement précoce, car si l'on peut traiter précocement, on peut enrayer, voire déstabiliser la maladie pour l'empêcher d'évoluer vers le stade sévère. “

Le maintien à domicile d’un malade à Corps de Lewy est-il possible ?

M. de Linares explique que la question du maintien à domicile des malades à Corps de Lewy dépend en grande partie des circonstances relatives à chaque cas particulier. Les malades à Corps de Lewy nécessitent un accompagnement très spécifique, que ce soit à domicile ou en EHPAD. Malgré les troubles du comportement, les malades conservent une très grande forme de lucidité et une grande sensibilité, même à un stade très avancé de la maladie. L’accompagnement prodigué habituellement pour les malades d’Alzheimer, par exemple, n’est pas adapté aux malades à Corps de Lewy et, là encore il convient de faire une distinction et d’aborder la maladie de manière distincte. 

Les malades à Corps de Lewy ne rencontrent pas tant des difficultés de mémoires que des problèmes d’attention, de concentration et des troubles du comportement. Que l’on décide de prolonger le maintien à domicile ou de faire entrer la personne en EHPAD, il est important de s’assurer que les personnes qui seront au contact avec le malade bénéficient d’une formation ou du moins de connaissances spécifiques de cette maladie, des bonnes réactions à avoir, du comportement adéquat à adopter face aux symptômes et aux fluctuations fréquentes de ces symptômes. 

Comment réagir face à un malade à Corps de Lewy ?

De la même manière que la maladie à Corps de Lewy nécessite un diagnostic et un suivi médical particuliers, la prise en charge en maison de retraite et l’attitude à adopter par les aidants doivent impérativement être ciblées. Les aidants, aides à domicile et aides-soignants en EHPAD doivent être capables de tenir compte des nombreuses instabilités de comportement et de symptômes caractéristiques de la maladie à Corps de Lewy. 

M. de Linares explique par exemple qu’un malade, même à un stade avancé, peut être tout à fait capable de tenir une conversation et d’échanger avec son entourage pour, l’instant d’après, se retrouver complètement perdu au point de ne plus savoir qui il est. Dans ces moments-là, il peut prendre la personne à côté de lui, même un proche, pour un sosie malveillant. Son entourage a la possibilité de le calmer et de l’apaiser pour autant qu’il connaisse la réaction appropriée à adopter. 

Lorsque l’on ne sait pas comment réagir, on peut au contraire amplifier ces symptômes et troubles du comportement déjà lourds. Les aides-soignants et aidants familiaux doivent être capables de faire preuve d’une très grande empathie envers les malades à Corps de Lewy, car il s’agit de personnes qui développent une hypersensibilité et une grande anxiété. Toute forme d’autorité même justifiée peut être très mal perçue et vécue par un malade à Corps de Lewy, voire engendrer une certaine agressivité de sa part. L’empathie et la douceur permettent généralement de calmer l’expression de certains troubles du comportement fréquents le jour, mais aussi la nuit. “Nous sommes extrêmement sensibles au stress mais aussi extrêmement sensibles au bonheur, confie Mme Catherine Laborde, malade à Corps de Lewy qui se bat auprès de l’Association pour faire mieux connaître la maladie.

Durant la phase de sommeil paradoxal, par exemple, il est fréquent que les malades aient un comportement proche du somnambulisme avec la particularité qu’ils se sentent souvent persécutés. 

Adopter la bonne attitude dans ces moments-là est particulièrement crucial. Un malade peut sortir de son lit et être tout à fait actif durant son sommeil, même s’il est grabataire au quotidien. M. De Linares précise qu’il ne faut pas se fier aux apparences car on pourrait conclure de manière erronée à une simulation de la part du malade. Cette erreur de jugement ne ferait qu’aggraver la situation. Notons également que, même éveillé, un malade à Corps de Lewy peut adopter de manière successive et rapprochée des comportements très différents. Ces fluctuations sont souvent très difficiles à vivre pour un proche et il est important de bénéficier d’un accompagnement au quotidien et du soutien de professionnels qualifiés. 

Les actions de l’Association des Aidants et Malades à Corps de Lewy

L’Association multiplie les actions visant à aider, soutenir, former et informer. Elles se répartissent en différents pôles essentiels : apporter aux malades et aux familles un soutien moral et pratique au quotidien et les représenter auprès de diverses instances. Promouvoir et encourager la recherche, notamment par le biais de son comité scientifique. Informer et former les professionnels de la santé et le grand public pour une prise en charge adaptée et un accompagnement optimal des familles et enfin sensibiliser les pouvoirs publics.

La deuxième grande rencontre sur la maladie à Corps de Lewy organisée par l’Association aura lieu le 16 mars 2020 à l’hôpital de la Timone de Marseille, avec l’intervention et la participation de nombreux scientifiques, médecins, philosophe, aidants et malades. 

Si vous êtes à la recherche d’unEHPAD adapté aux besoins spécifiques d’une personne atteinte de la maladie à Corps de Lewy, un conseiller dédié de Retraite Plus vous guide dans toutes vos démarches. 

Numéro Vert gratuit : 0800 941 340

Rédaction : Rachel Gaillard
Rédactrice en chef
12 février 2020, à 11h00
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